Midi de la Poésie /
Nadine Gordimer : L’écriture et l’existence
Beata Umubyeyi Mairesse et Bwanga Pili Pili
Loin de tout manichéisme, Nadine Gordimer a dépeint son pays, l’Afrique du Sud, durant près de 70 ans. Elle nous a offert des nouvelles, des romans et des essais capables de rendre intelligible toute la société sud-africaine à travers ses rapports de races, de classes et de sexes.
Née en 1923 dans une petite ville minière du Transvaal, proche de Johannesburg, de parents juifs immigrés, Gordimer prend progressivement conscience de son identité blanche, de ses privilèges et du système raciste qui sous-tend tout le fonctionnement de son monde, avant de le questionner et de changer fondamentalement son rapport aux Noirs. Militante antiapartheid, elle verra plusieurs de ses romans censurés mais aussi, à son plus grand bonheur, la fin du régime de ségrégation et l’arrivée au pouvoir de Nelson Mandela. Pourtant ce n’est pas une littérature à thèse qu’elle nous a laissée en héritage et ça n’est pas le militantisme qui a nourri son œuvre littéraire, bien que celle-ci soit éminemment politique : « c’est la tension entre ne pas prendre parti et être complètement engagé qui crée l’écrivain ».
Avec une ironie sans pareille et un regard perçant, ses textes de fiction disent les relations complexes entre les hommes et les femmes, les rapports entre les Noir‧e‧s et les Blanc‧he‧s (les conservateurices racistes comme les militant‧e‧s de gauche antiapartheid), avec une préoccupation humaniste qui l’éloigne de l’anecdotique, du folklorique, questionnant par là même nos représentations européennes sur le continent africain et l’Afrique du Sud en particulier.
Lauréate du Booker Prize en 1974 et du prix Nobel de littérature en 1991, elle est morte en 2014.
Beata Umubyeyi Mairesse est née et a grandi au Rwanda. Métisse, elle apprend à habiter entre le monde des Blanc‧he‧s qu’elle fréquente à l’école belge de Butare et le monde noir de sa famille maternelle qui l’élève. En 1994, en partie grâce à sa peau claire, elle survit au génocide des Tutsi et arrive en France où elle rencontre l’œuvre traduite de Nadine Gordimer. Nouvelliste (Ejo suivi de Lézardes et autres nouvelles) et poétesse (Après le progrès), elle a publié en 2019 son premier roman, Tous tes enfants dispersés, prix des cinq continents de la Francophonie. Admirative de l’œuvre de Gordimer, trop méconnue dans la Francophonie, elle propose ici de re(découvrir) ses textes magistralement ciselés, qui entrelacent les destins personnels marqués par des assignations identitaires à la grande histoire politique de l’Afrique.
Originaire du Kivu, Bwanga Pilipili est diplômée de l’INSAS en 2012. Au théâtre, on la voit notamment dans Les Monologues du Vagin, mis en scène par Nathalie Uffner, dans Une saison au Congo d’Aimé Césaire, mis en scène par Christian Schiaretti, ainsi que dans Hate Radio de Milo Rau. Au cinéma, elle joue dans Black de Adil El Arbi et Billal Fallah, Les empreintes douloureuses de Bernard Auguste Kouemo, Tu seras mon allié de Rosine Mbakam, Pickles de Manuella Damiens, et, plus récemment, dans Kaniama Show de Baloji. En 2018, elle écrit et met en scène Datcha Congo, adaptation de La Cerisaie de Tchekhov, sur la scène du Tarmac des Auteurs à Kinshasa. Depuis 2012, elle anime des rencontres littéraires au sein de l’association Lingeer, et est également co-organisatrice du festival Bruxelles/Africapitales.
En partenariat avec la Maison de la Francité
Kalender
-
- 12:40