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Théâtre National Wallonie-Bruxelles

Dans la rue, je perçois un élan de vérité et je me sens juste quand j’y joue

Le Dernier salut / Interview / Partie II / Nicolas Buysse

©Maud Faivre

Tu as commencé à parler de la scénographie mobile en évoquant les lanternes lumineuses. Y a-t-il d’autres éléments ?
Oui, il y a deux grands rideaux qu’on peut placer librement et qui donnent le cadre de scène, là où l’on a envie de se poser. Et puis, en créant le spectacle, on a réalisé que la lune avait son importance. Elle est présente dans beaucoup de textes. Et quand on y pense, la lune, c’est aussi en quelque sorte le projecteur des comédiens, une sorte de poursuite braquée sur eux en permanence. On retrouve donc cette lune et les étoiles dans le cortège, un cortège où l’on porte tous les spectacles qu’ils ont faits.
On aura également des chansonniers. Les spectateurs en seront équipés, car on égrène des musiques en rapport avec les textes tout au long du parcours. On ne voulait pas se priver de chanter et de permettre à ceux qui le veulent de nous accompagner.

Et les costumes, peux-tu nous en parler ?
Le Théâtre National a une réserve de costumes totalement incroyable. On est donc tout bonnement allé puiser dedans. On utilise quantité de petits accessoires qui donnent tout à coup le code théâtral. Par exemple, ils jouent un extrait du « Menteur » de Corneille ; il suffit de mettre une cape qui en devient le code. Nous avons d’ailleurs repris les vraies capes qu’ils avaient porté dans « Le Menteur ». On a aussi trouvé des smokings qui ont été utilisés maintes fois; ect. Nicole Moris, responsable des ateliers costumes, va les customiser afin de les rendre plus lumineux

La rue c’est vraiment ton terrain de jeu. Est-ce que tu peux nous expliquer pourquoi tu es si attaché à la liberté qu’on peut y trouver ?
Dans la rue, tout devient d’un extrême réalisme. Je me lasse parfois dans les salles de théâtre de voir une fausse cuisine reconstituée, un salon, la façade d’une maison,... A un moment donné, en tant que spectateur ou comédien, j’en ai trop vu, je n’y arrive plus. J’aime la rue parce qu’on est dans la vraie vie. On y croise de vraies personnes. Le temps ne s’arrête pas. Il n’y a pas de quatrième mur comme au théâtre. On y est plus fragile aussi en tant que comédien, mais du coup il y a une sorte de décharge d’adrénaline, quelque chose de très puissant qui en ressort. La rue, c’est vraiment sans filet…Il y a aussi un côté très cinématographique. C’est un mélange de jeu, de fiction et de réalisme à l’état pur. Cela me fait penser à cette phrase de Francis Bacon : « La réalité, telle qu’elle est présentée dans les théâtres ou les salles de spectacle, devient inintéressante. Il faut aller la provoquer, il faut aller la trouver ». Et ça, c’est surtout dans la rue qu’on peut le faire.

J’aime en général tous les arts urbains, j’aime beaucoup les villes. J’aime y utiliser mon cadre de jeu car cela me donne plus d’idées que dans une salle. Cela me nourrit. Souvent, j’ai l’impression en tant que comédien d’être un peu un escroc à toujours faire semblant. Or dans la rue, je ne sais pas pourquoi, je perçois un élan de vérité et je me sens juste quand j’y joue.

Le Rideau de saison, Maak & Transmettre · photo : Lucile Dizier, 2024